Le mot du président (01-2017)

Il y a tout juste 100 ans, Freud publiait Une difficulté de la psychanalyse.

Dans cet article, il y commente la raison principale du rejet de la psychanalyse en évoquant les trois vexations narcissiques qu’a subi l’humanité de la part de la recherche scientifique.

La première est une vexation cosmologique avec Nicolas Copernic qui, à l'époque de la Renaissance, met en évidence que l’homme n’est pas le centre de l’univers. La seconde est une vexation biologique avec Charles Darwin qui établit que l’homme est issu du règne animal. Et enfin, la vexation certainement la plus douloureuse, la vexation psychologique issue de la théorie psychanalytique et de l’introduction des processus inconscients où Freud révèle combien « Le moi n’est pas maître dans sa propre maison ».

Il est un fait que depuis l’œuvre de Freud et avec les avancées de Lacan, l’approche psychanalytique n’a en effet cessé de subvertir le sujet moderne du savoir et ce, pour mieux laisser entendre les murmures du sujet de l’inconscient. Cette nomination qu’est le sujet de l’inconscient n’est d’ailleurs pas sans poser la question de son statut car reconnaissons-lui, à tout le moins, cette particularité d’engendrer un savoir dont le contenu échappe dès qu’il s’énonce. Les divers repères hérités notamment des apports théoriques de nos ainés sont certes essentiels mais, nous ne devons jamais oublier que nous avons constamment à les réinventer et ce, non seulement pour chaque cure mais aussi pour chaque moments singuliers d’une même cure.

Toutefois, aujourd’hui, le monde de la « santé mentale » donne l’impression de ne plus s’émerveiller de la singularité de la clinique tant la normalisation des soins au niveau politique ne cesse de réduire et de phagocyter l’espace de parole et de créativité. Or, cette espace de créativité n’est-il pas au cœur de la pratique de la psychanalyse ? La normalisation n’a-t-elle pas pour conséquence directe de pourvoir constamment du sens ? Et ce don de sens, ne dépossède-t-il pas les analysants de cette créativité ? La normalisation, recherchée en vain par le mouvement sociétal, engendre non pas de la rigueur clinique comme elle le souhaiterait mais simplement la rigidité de la standardisation et son effet de désubjectivation. Tout ceci n’est pas sans poser la question aujourd’hui de ce qu’implique d’être un sujet qui parle, autrement dit un sujet créateur.

Il y a 100 ans, lorsque Freud critiquait l’approche philosophique humaniste et classique qui concevait le sujet comme maître de soi, de la conscience et ce, afin souligner que le moi était avant tout une instance de méconnaissance et d’illusion, ne cherchait-il pas à mettre en évidence la fonction désaliénante, libératrice de la psychanalyse ? Or, il importe plutôt dans notre société aujourd’hui de ne plus penser et de rentrer dans les carcans des standards calculés scientifiquement prônant la maîtrise de la demeure psychique, autrement dit l’éradication du symptôme. Qu’est-ce que le symptôme si ce n’est justement cette créativité subjective.

L’une de nos tâches les plus importantes est donc de maintenir vivant le développement de la singularité psychique et ce, en continuant la transmission de la psychanalyse. C'est pourquoi, plus que jamais, nous avons à maintenir notre engagement concernant notre rigueur théorique et clinique. C'est ce que s'efforcent de conjuguer nos ateliers d’enseignements, nos ateliers, nos cycles de conférences à Bruxelles, Namur et Mons ainsi que nos groupes d’intervision. Ces derniers sont riches et précieux car ils permettent tant aux jeunes en formation qu’aux aînés de réinventer avec chaque patient leur clinique. Ce type d’échanges permet ainsi, au mieux pour chaque clinicien, chaque analyste, de garder la créativité nécessaire à sa fonction.

Aussi, en ce début d’année 2017, je vous souhaite, à toutes et à tous, une bonne reprise et beaucoup de plaisir dans votre travail.

Cédric Levaque
Président d’Espace analytique de Belgique

 

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