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Introduction de "Pour repenser la psychanalyse"

Alain Vanier

2025

Figures de la psychanalyse, n°47, Toulouse
Certes, chaque psychanalyste est « forcé de réinventer la psychanalyse » puisque celle-ci est intransmissible. Cette intransmissibilité a déjà été soulignée à demi-mot par Freud [1]. Réinventer implique peu ou prou de repenser. Mais pour un analyste, la pensée est toujours suspecte, un « affect », mais inévitable : nous ne cessons de penser la psychanalyse comme en témoignent les publications, les écrits, tous les modes d’échange dans la communauté analytique et au-delà. Lacan est sans doute l’un des premiers à avoir exposé sa méthode, dès le début de son enseignement, c’est-à-dire comment il repensait la psychanalyse à partir de sa réinvention, pour cerner encore un peu mieux ce qui ne peut se transmettre de la pratique. Dès le début de son enseignement, il précise : « À l’élaboration de la pensée de Freud, nous voulons appliquer le même mode d’interprétation que Freud pratique pour ce qui se passe dans l’ordre psychique [2]. » Repenser implique donc interpréter, d’autant que les textes de Freud sont remplis de « contradictions », mais ce sont « des contradictions organisées […] et non pas simplement des antinomies ». En effet, le « mouvement de la pensée de Freud […] n’est pas achevé […] ne s’est jamais formulé dans une édition définitive, dogmatique [3] ». N’en est-il pas de même pour ceux de Melanie Klein, de Winnicott, etc., et bien sûr de Lacan ? C’est pourquoi repenser signifie – mais pas seulement – « retour à », retour aux textes de ceux qui nous ont précédés : « commenter un texte, c’est comme faire une analyse [4] », ce qu’il convient d’entendre dans les deux sens de la formule. N’est-ce pas ce qu’a fait Melanie Klein en s’appuyant sur une simple phrase des Trois essais, ou Lacan en revenant à la première topique, à ce qu’il a nommé les textes linguistiques de Freud, topique oubliée à l’époque où il débute son enseignement ?